La navigation des Canaries au Cap Vert n’a pas été un long fleuve tranquille, et quelques réparations furent nécessaires.
La plus grosse, l’enrouleur du génois. En effet, le dernier jour de nav’, alors que le vent et la mer s’étaient enfin calmés, nous décidions de dérouler le génois en entier. Déroulé trop violemment, le tambour de l’enrouleur s’est rompu, et notamment le roulement à billes qui s’y trouvait. Le problème est double ; d’une part un enrouleur, ça coûte cher, d’autre part, ça ne se trouve pas au Cap-Vert. Transater sans enrouleur nous traverse l’esprit. À l’ancienne, avec des voiles sur mousquetons ? Heureusement, la solidarité entre plaisanciers a encore une fois fait son œuvre. Notre voisin de ponton connaît un « super mécano qui sait tout faire » ; Ildio, notre sauveur. Le matin, le voilà qui démonte l’étai puis le tambour de l’enrouleur, l’après-midi il demande à son pote de ré-usiner la pièce, il nous fera un roulement en téflon qu’il monte lui même sous pression. En fin d’après-midi, le tambour est réinstallé, l’étai remis, le génois peut de nouveau vivre sa vie.


Nous sommes également inquiets au vue de l’anode de l’hélice (du sail drive pour être précis) qui est bien bouffée. Nous demandons à Ildio s’il ne connaît pas un plongeur pour nous la changer. Il nous trouve l’homme de la situation. Pourtant, avec ses tongues et son allure bien « à la cool », nous nous demandons s’il n’a pas oublié son matos de plongée… aucune bouteille à portée de main. Ildio, qui parle français, nous dit qu’il plonge en apnée. Nous sommes d’un coup beaucoup moins sereins, et même carrément sceptiques. Pour changer l’anode, il faut en effet d’abord enlever l’hélice, qui est une « bec de canard » et donc se démonte en plusieurs morceaux qu’il ne faut pas perdre dans l’eau… Il nous rassure en disant que c’est son métier, que ça ne lui fait pas peur. C’est parti, pièce après pièce, avec grand calme, il démonte cette hélice, change l’anode, remet la nouvelle, et remonte l’hélice (préalablement allégée de ses coquillages par nos soins…). Très professionnel, nous sommes impressionnés ! Merci !
Au Cap-Vert, à part un minuscule shipchandler, il n’y a pas grand chose pour la plaisance. Mais il faut trouver le bon contact, et le alors le dicton « in Africa, tout est possible » prend tout son sens.
Ainsi nous rencontrerons également Gabriel, président du club nautique de Mindelo. Nous lorgnons sur un mât d’optimiste un peu tordu pour nous en faire un tangon (pour pouvoir tangonner un deuxième génois en transat et gagner en stabilité du bateau). Gabriel ne veut pas nous le vendre, mais nous emmène à l’autre bout de la ville dans un magasin tenu par un chinois qui a notamment des tubes aluminium de diamètre 50mm, exactement ce qu’il nous faut. Un tronçon de 3m fera l’affaire, le voilà notre tangon !

Nous réglons aussi le problème de rotule du régulateur d’allure, à l’aide d’une durite et de colliers d’électriciens qui feront la jonction entre la pâle aérienne et immergée de Philip’. Cette solution aura très bien marché !
Ce que nous retiendrons assurément de cette première expérience de grand voyage, c’est la solidarité entre navigateurs, ou plutôt entre « bateaux copains » comme nous nous plaisons à dire. Solidarité sans laquelle ce voyage n’aurait été possible. Il y a d’abord les discussions bateau où l’on apprend toujours quelque chose, les partages de connaissances, les partages d’expériences, les conseils, les bons tuyaux, les prêts de matériel, d’outils, le coup de main qui dépanne et qui remonte le moral, les échanges qui font chaud au cœur et nous permettent d’avancer encore. Des bateaux copains donc dans les coups durs mais aussi dans les bons moments, pour profiter d’un apéro au coucher du soleil par exemple !
Cette fois ci, c’est le bateau copain « Bulle » qui fait appel à notre aide. Ils ont en effet un problème de safran, ou plutôt de compensation du safran par où l’eau s’infiltre dans le bateau. En effet, la compensation du safran fait partie intégrante de la structure de la coque, et il se trouve qu’elle était déchirée et bougeait dangereusement. Nous les avons aider à re-stratifier cette partie pendant deux jours, fibre de verre, résine, fibre de verre, résine, pour un total de 15 couches ! Nous sommes maintenant les pro’ de la stratification ! Apprentissage 🙂


Opérations réparations réussies, derniers réglages faits, coque grattée en apnée pour avoir une carène lisse et mieux glisser sur l’eau ; on est prêt juste à temps pour accueillir notre dernière équipière fraichement débarquée de Suisse, Shan, en compagnie de fromages et chocolats (c’est important de savoir choisir ses équipiers :D). Aller, un dernier petit tour sur l’île de Santo Antao pour se dégourdir les jambes avant le grand départ, faire découvrir les rando’ au milieu des bananiers, goyaviers, papayers, cannes à sucre, arbre à pain à notre équipière et filmer les cultures en terrasses caractéristiques de ces îles volcaniques escarpées où l’érosion a à peine commencé son œuvre.



Super ce texte et génial de trouver des bateaux copains pour se faire des pansements.
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